
En effet, quand on écrit, il n’y a aucune distraction, aucune séduction. Notre vérité toute nue. Notre âme en vue. On ne peut voler la vedette à nos mots. Avec nos doigts et notre coeur, on se dépose, mots noirs sur écran blanc, et on dévoile ses pensées, ses émotions, ses tripes, son coeur et son âme à la vue du monde entier.
C’est gratuit, c’est ouvert, c’est offert, c’est tout cru, que les gens nous croient ou pas. Et nous, nous sommes tout cuits car on s’expose le coeur au malentendu et aux jugements d’autrui. Nos mots se mettent à la merci de tous et toutes. À la grâce des yeux, d’autrui.
Lorsqu’on parle, on peut se cacher derrière les mots, on peut tenter de rationnaliser, de surexpliquer, de faire du bruit pour faire avaler les mots, on peut tenter de convier par le biais du corps, le sens de ses mots. On peut tenter de démontrer ce que l’on veut dire en gesticulant, en enrobant nos mots de sparages.
Quand on parle et qu’on gesticule, on tient les autres captifs, on pervertit – plus ou moins – nos paroles, on leur fait du bruit. Et souvent on étouffe le silence. Quand on écrit, on peut mettre de l’enrobage autour de nos mots pour se dégêner. Nos mots sont offerts at large, grand ouverts, grands et ouverts à tous et toutes. À l’écrit, nos mots s’offrent tout nus.
Par l’écriture qu’on pénètre le mieux les gens en effet. À condition qu’ils et elles se laissent pénétrer. Très respectueux l’écriture. On offre et le monde dispose. Ou la plupart du temps pas. Car la grande majorité des mots que l’on publie, poste et imprime ne sont pas lus. Ça requiert beaucoup d’humilité écrire. On dépose et le monde dispose. Comme dans le terme anglais disposal qui veut dire détruire ou se débarasser de. Car oui, souvent nos mots ne trouvent pas preneurs.
Quand on écrit, on ne donne pas ses mots, on les offre. Message in a bottle chantait le poète.
Par l’écriture qu’on pénètre le mieux les gens, mais par la chanson aussi. Quand on chante devant les autres, pour les autres, on offre sa voix, qui se veut une courroie directe de son coeur vers le coeur des autres. Donc on ouvre son coeur à tous vents, à toutes oreilles. Et à la grâce de Dieu.
Les mots noirs sur le papier blanc – ou de plus en plus sur l’écran – c’est notre âme toute nue présentée au monde, dévoilée, démaquillée. Et la plupart du temps ignorée.
Alors ce matin, voici mes mots, que vous lirez, ou pas.
Et de toute façon, ils ne sont pas vraiment mes mots non plus, ils ne sont que les mots qui ont choisi de sortir ce matin. Les mots les plus pressés de sortir de ma tête, mon coeur et mes doigts, ceux qui se sont rendus jusqu’à vous. Mais pour la plupart, ces mots ne seront pas lus, ni entendus. Et cela est juste et bon. Les chances statistiques que vous lisiez ces mots sont si faibles.
Et si nos mots ne sont pas lus, aucun problème. Car au fond, on ne parle toujours qu’à soi-même.
Vous, entendez-vous ? Vous entendez-vous ?