PEUR, PERTE ET VÉRITÉ

Il existe quatre choses dans la vie qui vont te transformer: L’amour, la musique, les arts et la perte. Les trois premiers vont te garder sauvage et passionné.e. Puisses-tu permettre à la perte de te rendre brave.
– Erin Van Vuren

La peur est l’un des plus puissants moteurs de vie. Soit on a peur d’elle, et elle nous fige, elle se fige en nous et nous paralyse. Soit on la fait sienne, et on fait avec.

Au coeur de la vie il y a la peur. Et son fidèle et inséparable compagnon, le courage.

Oui, la vie est épeurante, vertigineusement, viscéralement.

Épeurante dans son imprévisibilité, dès la naissance, mystérieuse et inexpliquée, qui nous catapulte dans une existence nouvelle et inconnue, et ce jusqu’à la mort. Cette vie qui nous donne tout, mais qui nous prendra et reprendra tout aussi. Cette vie qui nous alimente et qui nous soulagera éventuellement de tout le matériel dont on s’entoure, jusqu’à la perte ultime de notre propre corps, ce véhicule de chair qui nous permet de percevoir la vie, de la laisser passer et de toute la ressentir.

C’est peut-être à cause de cette vaste peur que nous tentons de nous rassurer avec toutes sortes d’affaires, dont des gens, mais aussi des croyances et des concepts avec lesquels on essaie de se sécuriser, de trouver raison et repères devant l’inconnu.

Mais éventuellement on échouera. Car la vie est surtout, et par dessus tout, insécurité, apprentissage de détachement et pertes multiples : déchéance du corps malgré l’âme qui voit tout, perte graduelle de nos êtres les plus chers, comme de tous nos biens, et aussi de nos illusions.

Épeurante dans sa dureté aussi la vie. Quand on regarde notamment ce qui se passe à Gaza, ou en Ukraine, à Haïti ou en Afrique, ou plus près chez l’oncle Sam, on réalise que certains humains sont plus durs les uns envers les autres qu’aucun animal ne peut l’être. On dit d’ailleurs que l’homme est le plus cruel des animaux. Serait d’ailleurs temps de donner le pouvoir aux femmes – gardiennes de la vie – et aux enfants, mais autre histoire que celle-ci.

Épeurante dans notre implication la vie. Car la vie est en nous, dans nos tripes, et nous sommes en elle par chacune de nos respirations. En lien avec tout le reste. Nous sommes la vie, bande passante temporaire, inexplicable, inévitable malgré nos tentatives de fuite. Car la vie se passe au-delà des mots. La vie bat, la vie est animale, elle coule dans nos veines, pulse dans notre coeur se meut par notre chair.

Si l’amour, la musique et les arts nous donnent le jus pour nous garder vivant.e.s et un peu sauvages, nous permettant d’avance et de faire sens de ce grand chaos, la perte nous ramène à notre plus profonde impression. Celle d’être des passagers, relativement impuissant.e.s devant l’immuabilité de notre destin d’êtres mortels.

Riding the human race.

La vie a passé, elle passe et continuera de passer, et nous, avec nous dedans, et autour aussi. Avec elle et avec tout, en tout, et en dépit de tout. La vie vient et la vie va.

Alors devant la peur, dans la peur, il nous fait apprendre le courage, cette force du désespoir qui émane directement du coeur, de l’action pure, de notre humanité. Celle qu’on apprend avec le temps qui passe et qui nous aide, et nous force, à s’impliquer et à nous détacher, cette pulsion de vie qui nous apprend à tout perdre.

Qui perd gang ?

Malgré la peur – ou avec elle ? – aimer pour trouver le courage.

En pensées avec tous les peuples en guerre qui apprennent la perte à la dure.

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Le Secret de Ceux qui n’ont Plus Peur

Ils marchent lentement.
Ils ne s’agitent pas.
Ils n’ont pas besoin de se défendre, ni d’impressionner.
Ils ont vu quelque chose.
Pas avec les yeux,
Mais avec l’âme nue.

Ils savent que la perte n’est pas la fin,
Que le vide n’est pas l’ennemi,
Que la mort n’est pas un mur, mais une porte.
Ils ont traversé la nuit,
Et dans l’obscurité,
Ils ont trouvé la lumière
Qu’on ne voit qu’en fermant les yeux.
Ils n’ont plus peur
Parce qu’ils ont cessé de s’accrocher.
Ils ne possèdent plus rien,
Et c’est ce qui les rend invincibles.

Celui qui n’a plus peur a vu la vérité,
Il n’est plus attaché à ce monde…
Son silence est une force, son regard apaisé,
Il est déjà parti, ne laissant qu’une intention pure.

Un jour, un soufi m’a dit :
« Le secret, c’est d’accepter de tout perdre avant que la vie ne te l’arrache.
Et de sourire quand même.
Ceux qui n’ont plus peur
Ont aimé plus fort que la peur.
Et c’est pour ça
Qu’ils sont libres. »


Tu veux ce calme profond ?
Ce détachement paisible ?
Alors ne cherche pas à vaincre la peur.
Aime au point qu’elle n’ait plus de place.
Et tu verras :
Ceux qui n’ont plus peur
Ne sont pas devenus forts.
Ils sont devenus vrais.

– Belkacem Bouasria, Ouldabderrahmane, via Nancy Vallée

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