MOMENT ? PRÉSENT

Je veux être dans le moment, mais juste pas CE moment.

Ici, maintenant. Moment. Mais toujours un peu ailleurs aussi, là-bas, plus loin, plus chaud, plus beau. All over the place. Pas mal tout le temps ailleurs d’ailleurs.

Et en même temps, toujours un peu avant aussi, dans le bon vieux temps. Make America Great again, and again, and again. Never good enough. Ou un peu plus tard, dans l’avenir meilleur et mieux.

On dit tous vouloir vivre le moment présent, vivre dans le moment présent. Oui oui, vous savez, ce fameux moment, celui que l’on cherche, celui que l’on désire tant, celui que l’on veut, créer ou tomber dessus, ou dedans. Comme Alice au pays des vermeilles. Ce moment qui n’a jamais encore existé, frais, spontané, inimaginé même. Celui qui n’existera jamais en fait. Moment unique, inédit. Ce moment out of this world. Pas ici et pas d’ici. Moment futile, débile moment.

Ce moment furtif et évasif qui se déguise en courant d’air, ce moment qui fuit, moment hors du temps. On veut ce moment, mais on le veut tout le temps, pas seulement pour un moment.

On veut ce moment de transition infini, celui qui lie le passé à l’avenir, sans jamais se laisser saisir, ni s’arrêter. Le moment marquant, the Moment avec un M MAJUSCULE. ah pis tiens, TOUT EN MAJUSCULE. MOMENT.

Comme chantait notre JayPi national: Moment, moment, ton fils passe un moment présent. Or something like that.

Veut-on vraiment vivre dans ce moment ? Si oui, ce moment-ci ou ce moment-là ? Ou un autre moment ?

Tout est question de momentum. Pas de moments en fait, qu’une infinie suite et ininterrompue suite de moments ne formant qu’un momentum.

En fait, on ne peut pas vivre en CE moment. Car il n’existe pas, aucun moment n’existe en soi, ils ne font que passer. Qu’une suite de moments, de passés à venir. Le présent se trouve entre les deux. Et fuit sans cesse. Faut le pogner quand il passe car toujours il ne fait que passer. Si un moment a déjà existé, il n’existe déjà plus. Avant qu’on ait dit moment, on est déjà rendu.e.s ailleurs, plus tard, dans l’autre moment qui lui aussi fuit. Au suivant le moment, au moment suivant.

La vie ne fait que passer, que couler, de moment en moment mais sans moments fixes. Un grand sablier sans fond, une infinitude de grains de sable moments tannés qui cherchent un sens dans nos plages horaires, parfois plages horreurs de Gaza parsemés de petits moments de bonheur et d’humanité.

Les moments se suivent et ne se ressemblent pas car si ils se ressemblent, la vie est plate. Imaginez un seul et même long moment. Le moment de la marmotte. Wo minute le moment. Et moi je seconde.

Les moments se suivent et ne se rassemblent pas non plus car si on les rassemble, en tas ou en châteaux dans le sablier, on ne fait que construire quelque chose sur du rêve, un amas de moments morts et enterrés qui finira par crouler sous le poids du corps.

Ah ce fichu moment. On devrait bannir le moment présent. Et vivre dans le vide. Vivre sans souci du moment, vivre décousu.e, vivre hors du temps. Car la vie se mesure en moments qui s’enfilent, se tricotent et se décousent.

Parfois, les moments sont durs, passent lentement comme l’éternité, les moments font du surplace et, parfois, les mouments sont doux et nous la coulent douce. Dolce vita et momento.

Alors être dans ce moment ou naître de ce moment ?

Moment, moment, le monde passe par un drôle de moment.

Une réflexion au sujet de « MOMENT ? PRÉSENT »

  1. Avatar de RaviRavi

    ici durant les cours de portugais quand les professeurs que nous sommes tendus par les nouvelles conjugaisons ou règles de grammaire ils nous disent (respire fundo): le moment présent, il est là, et je reviens dans le moment présent. Pour un instant car immédiatement après j’appréhende la suite jusqu’à la prochaine grande inspiration suivie de l’expiration

    J’aime

    Répondre

Laisser un commentaire