
La naissance est le début de la mort. Tout sur terre vient, puis va. Tout passe. Et chacun.e de nous dedans, avec, aussi. Pour certains, vieillir est un luxe, pour d’autres un long supplice quand la maladie, la guerre ou la pauvreté frappent.
Pendant que nous vivons ici, dans le confort et la paix, à se chamailler inutilement pour des pécadilles virtuelles parfois, un génocide se produit et un peuple est en train de disparaître. Ce drame prend place à l’abri de nos yeux car presque plus de caméras n’en rend compte, les journalistes ayant été presque tous éliminés. Tout ce que l’on peut faire est s’offusquer, rager et s’attrister. Et se relier.
En ce sens, ne manquez pas le très touchant reportage d’Émilie Dubreuil et Amélie Fortin et leur équipe de Radio-Canada qui ont maintenu une correspondance avec deux jeunes mères gazaouies. Bouleversant. https://ici.radio-canada.ca/recit-numerique/14055/lettres-gaza-palestiniennes-temoignages-guerre
Comme les mots me manquent un peu ce matin suite à la lecture de ce premier reportage d’une série de 4 (il y aura une balado aussi), je vais me faire passeur de ceux des autres.
Restons humain.e.s. Et présent.e.s.
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Les cinq rappels, par Thich Nhat Hanh
– Vieillir est dans ma nature. Je ne peux fuir la vieillesse.
– Mes actions sont mes seuls biens véritables. Je ne peux fuir les conséquences de mes actes. Elles sont le fondement sur lequel je m’appuie.
– C’est dans ma nature de tomber malade. Je ne peux fuir la maladie.
– Ma nature est de mourir. Il est impossible de fuir la mort.
– La nature de toutes choses et de tous les êtres est celle du changement. Je ne peux éviter de m’en séparer. Je ne peux rien garder. Je suis venu au monde les mains vides et je le quitterai tel quel.
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Nous sommes sans arrêt confrontés à des séparations.
La vie a une main qui plonge dans notre corps, se saisit du cœur et l’enlève.
Pas une fois, mais de nombreuses fois.
En échange, la vie nous donne de l’or.
Seulement, nous payons cet or à un prix fou puisque nous en avons, à chaque fois, le cœur arraché vivant.
Chaque séparation nous donne une vue de plus en plus ample et éblouie de la vie.
Les arrachements nous lavent.
Tout se passe, dans cette vie, comme s’il nous fallait avaler l’océan.
Comme si périodiquement nous étions remis à neuf par ce qui nous rappelle de ne pas nous installer, de ne pas nous habituer.
La vie a deux visages : un émerveillant et un terrible.
Quand vous avez vu le visage terrible, le visage émerveillant se tourne vers vous comme un soleil.
– Christian Bobin, La vie à deux visages, via Francine Baraban
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Socrate disait : L’abus du langage induit le mal dans l’âme.
Il ne parlait pas de grammaire.
Mal utiliser le langage, c’est l’utiliser à la manière des politiciens et des publicitaires, pour le profit, sans assumer la responsabilité du sens des mots.
Le langage utilisé comme moyen d’accéder au pouvoir ou de gagner de l’argent est mal utilisé : il ment.
Le langage utilisé comme une fin en soi, pour chanter un poème ou raconter une histoire, est juste, il tend vers la vérité.
Un écrivain est une personne qui se soucie du sens des mots, de ce qu’ils disent, de la manière dont ils le disent.
Les écrivains savent que les mots sont leur chemin vers la vérité et la liberté, et ils les utilisent donc avec prudence, réflexion, crainte, plaisir.
En utilisant les mots avec discernement, ils fortifient leur âme.
Les conteurs et les poètes passent leur vie à apprendre l’art de bien utiliser les mots.
Et leurs mots rendent l’âme de leurs lecteurs plus forte, plus lumineuse, plus profonde.
~Ursula K. Le Guin
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Le destin de l’Humanité se joue dans l’inconscience généralisée.
La situation est paradoxale sur notre Terre.
Les interdépendances se sont multipliées.
La communication triomphe, la planète est traversée par des réseaux, fax, téléphones portables, modems, Internet.
La conscience d’être solidaires dans leur vie et dans leur mort devrait lier désormais les humains les uns aux autres.
Et pourtant, l’incompréhension demeure générale.
Notre intelligence n’a pas atteint son épanouissement, notre conscience est encore barbare.
Nos possibilités spirituelles sont encore sous-développées, et les civilisations jusqu’à présent n’en ont permis que des développements unidimensionnels.
Une intelligence incapable d’envisager le contexte et le complexe planétaire, rend aveugle, inconscient et irresponsable.
– Edgar Morin
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Une beauté se dévoile en ce moment, que beaucoup ne peuvent pas encore percevoir.
Pour la première fois depuis des siècles, l’humanité se souvient comment créer ensemble.
Non pas par des systèmes de contrôle, ni par la peur ou la survie… mais par l’amour, la vision et l’unité.
Je vois des communautés s’élever.
Des familles se reconstruire.
Des gens redécouvrir ce que signifie rire, chanter, partager des repas sans le poids du monde sur leurs épaules.
Je vois des enfants grandir dans une réalité où leurs dons sont célébrés, et non passés sous silence.
Voici l’avenir dans lequel nous entrons.
Et il n’est pas loin… il est déjà là, dans les choix que nous faisons aujourd’hui.
Chaque acte de bonté, chaque étincelle de créativité, chaque instant où vous choisissez l’amour plutôt que la peur… cela pose les fondations du monde que nos cœurs ont toujours su possible.
Famille, levez les yeux.
Le changement ne concerne pas seulement ce que nous laissons derrière nous.
Il concerne ce que nous créons enfin.
~ Zachary Fisher
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L’art de perdre n’est pas difficile à maîtriser ; tant de choses semblent empreintes d’une intention de se perdre que leur perte n’est pas une catastrophe.
Perdez quelque chose chaque jour.
Acceptez l’angoisse des clés perdues, l’heure mal utilisée.
L’art de perdre n’est pas difficile à maîtriser.
Entraînez-vous ensuite à perdre plus loin, plus vite : des lieux, des noms, et là où vous vouliez voyager.
Rien de tout cela ne mènera au désastre.
J’ai perdu la montre de ma mère.
Et regardez ! Ma dernière, ou l’avant-dernière, de mes trois maisons adorées a disparu.
L’art de perdre n’est pas difficile à maîtriser.
J’ai perdu deux villes, de charmantes villes.
Et, plus vastes, des royaumes que je possédais, deux rivières, un continent.
Ils me manquent, mais ce n’était pas une catastrophe.
Même en te perdant, je n’aurais pas menti.
Il est évident que l’art de perdre n’est pas si difficile à maîtriser, même si cela peut ressembler à un désastre.
— Elizabeth Bishop





















