DE BOUE ET D’EAU

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Voilà, ci-haut, la version brune.

Mais ici dans le grand now, on a aussi une autre formule pour illustrer le même phénomène de sédimentation, la blanche, plus légère, plus fluffy :

Deux versions, mais leçon commune: patience et confiance.

Depuis quelque temps, le lac – ou la boule, c’est selon – d’un projet que je porte avec quelques ami.e.s depuis des années a été un peu brouillé par les changements. Oh, rien de majeur, mais comme la vie, de nombreux changements au sein des troupes sont survenus en relativement peu de temps.

Un peu ébranlant pour moi. Ce qui a apporté son lot d’incertitude et d’imprévisibilité, suscitant doute et questionnement, et requérant simultanément souplesse et fermeté. Humildade.

Je parle publiquement de ces doutes et questionnements car je les porte en moi, en mon corps et en mon esprit. Nous formons une équipe et lors de telles mutations, je considère que tout le monde doit être tenu au courant. Nous avons d’ailleurs une rencontre ce soir avec le choeur restant pour éclairer la suite des choses.

En discutant avec ma douce suite à notre plus récente rencontre de groupe, elle se demandait si je devrais m’ouvrir autant sur mes états d’âme, si je ne devrais peut-être pas garder davantage pour moi ce brouhaha intérieur car ça risque de disséminer les doutes parmi les troupes.

Et m’est remonté en tête d’où je viens.

En 1988, lors de mon premier passage à la Humaniversity en Hollande, chez Veeresh, avec qui j’ai entretenu une marquante et longue relation autant amicale que professionnelle, j’avais joint le groupe en tant que participant. C’était un processus intense d’introspection et de profond travail émotionnel qui durait tout l’été. Life changing.

Un moment donné, après quelques jours, un des membres de l’équipe des thérapeutes s’est adressé publiquement devant le groupe en avouant qu’il vivait une situation difficile, qu’il avait commis un faux pas et qu’à la demande de Veeresh, il joignait le groupe en tant que participant.

Pour moi qui n’avait connu auparavant que des thérapeutes qu’on mettait sur un pied d’estale, c’est exactement cette transparence et cette humilité qui m’ont convaincu de me faire formé par et chez Veeresh.

D’ailleurs, j’ai été témoin à quelques reprises de la part même de Veeresh d’une telle transparence, lui qui s’ouvrait complètement à la communauté avec ses états d’âme lors de grands mouvements au sein de sa communauté. Je l’ai vu en pleurs et effondré notamment à la mort d’Osho, comme à quelques autres occasions. Lui qui savait être ferme et clair pouvait aussi être tout autant fragile et vulnérable.

J’ai été ébranlé cette année par différents événements qui ne se sont pas déroulés tels qu’on les avait planifiés, ainsi que par une foule de changements qui sont sains, inévitables et naturels au sein de tout groupe, mais qui ébranlent toujours lorsqu’ils arrivent les uns après les autres.

Mais overall, comme d’habitude, après le grand tremblement, tout est toujours pour le mieux, même si pas toujours évident à encaisser sur le coup.

Et samedi dernier, comme par magie, grâce à de superbes hymnes, et une précieuse harmonie nouvellement retrouvée, les choses sont tombées en place.

La boue, et/ou la neige, s’est déposée. Euréka !

Après quelques mois de doutes et de questionnement, the church must go on.

On se prépare pour nos deux derniers travaux de l’année, avec nos hymnes piliers, suite à quoi on sera en pause pour quelques mois pour laisser se poursuivre le grand dépôt, alors qu’on retournera au Brésil en février.

Comme dit l’ours, relaxe, l’hiver porte conseil.

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La vie a une main qui plonge dans notre corps, se saisit du cœur et l’enlève…
Pas une fois, mais de nombreuses fois.
En échange, la vie nous donne de l’or…
Seulement, nous payons cet or à un prix fou puisque nous en avons, à chaque fois, le cœur arraché vivant…
Chaque séparation nous donne une vue de plus en plus ample et éblouie de la vie.
Les arrachements nous lavent.
Tout se passe, dans cette vie, comme s’il nous fallait avaler l’océan.
Comme si périodiquement nous étions remis à neuf par ce qui nous rappelle de ne pas nous installer, de ne pas nous habituer…

La vie a deux visages : un émerveillant et un terrible.
Quand vous avez vu le visage terrible, le visage émerveillant se tourne vers vous comme un soleil.
~ Christian Bobin, La vie à deux visages

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Au début de votre quête spirituelle, vous rejetez l’entité corps-esprit, en disant
je ne suis pas ça.
Puis vous arrivez au je suis, sans rien d’autre, sans mots.
Puis vous êtes le tout, vous n’êtes plus limité.e au corps-esprit.
La présence de la conscience est sentie grâce à cet instrument, le corps-esprit ; mais Moi, l’Absolu, je ne suis pas ça.
Après s’être stabilisés dans la conscience, on se met en position d’observer la conscience, et tout ce qui se passe en elle, juste pour comprendre.
L’attachement à l’entité corps-esprit et à la conscience est très fort, il est très difficile de s’en défaire.
La venue au monde, l’organisation chimique qui permet à l’entité corps-esprit d’exister, n’a ni forme pré-établie, ni dessein ; et en vérité, elle n’existait pas.
Cette chose-qui-n’existe-pas, existe soudain.
Quelle peut être sa valeur intrinsèque ?
C’est seulement une apparition, ça ne peut pas être la vérité.
C’est pourquoi j’ose dire ce que je dis : [cette apparition] est une vaste mystification, un attrape-nigaud, créé à partir de rien.
Peut-on créer quelque chose à partir de rien ?
Tout ce que j’ai pu dire est maintenant solidement enraciné dans votre soi-disant entité corps-esprit, vous n’allez pas pouvoir vous en défaire.
Avec le temps, ça deviendra connaissance.
Je ne désire pas la vie, même pour un moment ; et pourtant dans cette existence temporaire, il y a tant de vies.
Je n’ai pas peur de la mort.
Avec la mort, l’imperfection disparaît.
La conscience, la marque de l’imperfection, se dissipe.
Il reste la perfection totale.
Il n’est pas sûr que je puisse vous voir demain ; mais ça n’a aucune importance.
Le fait est qu’il n’y a pas de séparation du tout entre vous et moi, nous ne sommes qu’un. N’allez pas imaginer qu’il y a une séparation quelconque. »

– Nisargadatta Maharaj, – Extrait de « Conscience et absolu – 11 janvier 1981
via Jean Bouchart d’Orval

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