AT TENDRE (VERS) LA VIE

Tu n’as pas besoin de quitter ta chambre. Reste assis à ta table et écoute. N’écoute même pas, ne fait qu’attendre, reste tranquille, immobile et solitaire. Le monde s’offrira tout simplement à toi afin d’être démasqué; c’est inévitable, il ne fera que se présenter à toi sous forme d’extase.
– Franz Kafka

Wow, tout un statement que celui-ci de Kafka ce matin. Laissez-moi le répéter phrase par phrase car riche en indices de vie.

Tu n’as pas besoin de quitter ta chambre.

Qui parmi nous peut ne pas quitter sa chambre ? Et ce, même si elle inclut une salle de bain 😉

Car nous avons tant à faire, tant de besoins à satisfaire autres que dormir et attendre : par exemple, manger, socialiser, parcourir le monde, aller en nature, se divertir, s’activer au boulot pour réussir à payer ses comptes, et si on est chanceux, à ne pas perdre sa vie en tentant de la gagner. Monde de matière à faire.

Mais rester seul(e) chez-soi ? Gros gros défi. Quoi qu’on dise que certains jeunes japonais ne sortent plus de leur chambre pour ne jouer qu’à des jeux en ligne.

Personnellement, j’ai de moins en moins d’intérêt à sortir de chez-moi. Je m’y sens comblé, si bien entouré, et en plus, j’ai la chance d’avoir des ami(e)s qui passent régulièrement pour faire musique et silence. Grande grande chance. Home sweet home.

Reste assis à ta table et écoute.

Même si je ne fais pas que ça, de plus en plus le silence, l’observation et la méditation sont mes in/activités de plus en plus favorites, avec faire musique. Quelques travaux manuels et quelques marches en forêt meublent aussi mon quotidien car matière oblige et matière matière tant tu nous tiens et tant nous sommes.

Mais je pense savoir ce que Kafka tente de nous communiquer avec ses mots: Il n’y a rien à obtenir de l’extérieur, tout est déjà ici, déjà en soi. On n’a qu’à demeurer alerte et à écouter.

Et si on ne peut faire autrement, apprendre à écouter en étant actif. Quand même une job de pro.

N’écoute même pas, ne fait qu’attendre, reste tranquille, immobile et solitaire.

Oh il ne suffit pas de simplement écouter semble-t-il; non, il va plus loin en disant: n’écoute même pas, ne fait qu’attendre, immobile et solitaire.

Autre gros contrat, quasi impossible à réaliser dans notre forme actuelle de personne il me semble. Car nous sommes des êtres d’action, des bibittes sociales, avec un grand besoin d’être diverti(e), désennuyé(e), que dis-je, mû(e)s par un désir quasi irrépressible d’interagir de diverses façons, de nous occuper, de bouger.

Avec le temps, et la contrainte du corps et parfois de l’esprit, on apprend, parfois à la dure et par obligation malheureusement, à rester tranquille, immobile et solitaire. Mais éventuellement, avec la mort qui nous attend, c’est l’état ultime dans lequel on finira notre vie. Alors pas peut-être pas une si mauvaise idée d’apprendre à se pratiquer d’ici là ? Pré-retraite ultime.

On perd tant de temps à tourner en rond, à regarder des écrans, la plupart du temps pour boire de si mauvaises nouvelles, ou désormais pour regarder la vie des autres sur des réseaux plus a que sociaux. Divertissement numérique et cathodique, observation de la vie extérieure à soi, tout pour ne pas – trop – se regarder soi-même.

Et pourtant, quoi d’autre que l’apparence de soi nous peut-on vraiment observer ?

Qu’est-ce qui mérite notre attention davantage que ce qui en nous entrave la vie à l’état pur ?

Le monde s’offrira tout simplement à toi afin d’être démasqué; c’est inévitable, il ne fera que se présenter à toi sous forme d’extase.

Le monde s’offrira tout simplement à toi. Si on ne l’interprète pas, si on ne le distortionne pas, le monde s’offre simplement à nous. Il le fait afin d’être démasqué. Mais pour cela, il faut le regarder sans filtre, les yeux dans les cieux, ici les deux pieds bien sur terre.

On définit généralement l’extase positivement, ou comme un état dans lequel une personne se trouve comme transportée hors de soi et du monde sensible, un état hors de soi. Il nous seulement à définir le Soi, s’il existe une telle chose. Est-ce que la part du divin en nous, ou la fin de la séparation d’avec le Grand Manie Tout ? Beaucoup de temps requis pour méditer là-dessus je crois. Beaucoup de silence encore à apprendre à faire.

De nombreux sages, dont Osho, mon best à moi, mon beloved, aimaient dire qu’il est inévitable qu’on retrouvera notre nature divine éventuellement, quoi que l’on fasse, effort ou pas. Kafka semble sorti du même moule en affirmant que le monde s’offrira à nous afin d’être démasqué inévitablement. Il affirme aussi qu’il se présentera sous forme d’extase. À faire fléchir, et réfléchir. Méditons là-dessus car il semble y avoir là un précieux secret.

Ce que je comprends de ses propos est qu’on sortira éventuellement de notre forme actuelle, qu’elle soit physique ou intellectuelle. On s’en libèrera, on s’en évadera, soit par la mort, soit avant si on réussit à allumer et à pogner la patente. Si on réussit à saisir existentiellement que l’oie n’a jamais été dans la bouteille 😉 Si on finit par entendre la seule et unique main qui applaudit. En fait si on finit par entendre le chuchotement Dieu car on a suffisamment écouté.

Donc à nos pieds, ou à nos oreilles. Ou est-ce au coeur de notre coeur ?

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