ÉCRIRE EN DILLETANTE

Écrire…
est souvent la seule chose qui te sépare de l’impossible… aucune boisson, l’amour d’aucune femme, aucune richesse ne peut l’égaler… rien ne peut te sauver à part écrire… ça permet aux murs de ne pas tomber, aux hordes de ne pas t’écraser… ça fait éclater la noirceur… écrire représente l’ultime Dieu parmi tous les Dieux…
– Charles Bukowski, Damned Poets Society

Quiconque connait un peu Bukowski sait qu’il a eu une vie difficile et intense. Mais on peut sentir combien l’écriture lui a été salvatrice pour passer à-travers ses démons et ses cauchemars.

Sans que la vie de votre humble chroniqueur ne soit aussi chaotique, l’écriture joue un rôle important dans ma petite vie beaucoup plus tranquille ici dans la forêt et je peux sentir ce que veut convier Charly boy.

La plupart des matins, aux aurores, au seuil d’une nouvelle chronique, après avoir choisi un meme qui m’inspire, je fais le vide, je me tasse du chemin et je me rends disponible aux mots. Je laisse passer le Dieu des Dieux des mots.

Je me tasse du chemin, du moins j’essaie, je laisse les mots monter, eux qui se bousculent même parfois un peu car ils veulent sortir avec tant d’enthousiasme. Moi je tente seulement de les ordonner un peu, de tenir les guides, de les démêler, de défaire les noeuds entre eux et de leur donner un sens unique ou multiple, avec un soupçon de non-sens et une touche de double sens qui souvent passera inaperçue. Mais là la vraie beauté peut-être, la nuance qui passe inaperçue.

Quand on écrit en dilettante, on est complètement libre, on n’a à répondre aux attentes ni aux demandes de personne. Personne ne nous paie pour nos mots, on peut donc écrire free, librement, gratuitement.

On peut se faire croire qu’on est écrivain, ou un écriveux, comme dans gosseux de mots, comme dans sculpteur de jeux de mots. Car comme pour un sculpteur, le gros du travail d’écriture consiste à retirer le trop plein, à alléger, à purifier ce qui veut se dire.

Les mots constituent le matériel brut, la matière première pour quiconque tente de dire ce qui ne se dit pas, l’indicible, l’inexprimable. Pour dire le silence, ce qui se cache entre les mots, ce qui se glisse entre les lignes. Tenter de tout dire pour ne rien dire.

Écrire ne sert à rien. Mais écrire permet tout. Écrire ouvre sur tout, ouvre à tout.

Ça permet de dire notre indignation devant l’horreur, car tant d’horreur en ce moment sur terre, particulièrement en Palestine. Nous, ici, spectateurs/trices, à regarder se déployer sous nos yeux un génocide alors que des milliers de mères et d’enfants sont attaqués, tués, affamés, assoiffés.

Les mots sont des larmes de destruction massive devant l’horreur. Aligner les mots pour exprimer son impuissance, pour dire sa détresse devant l’inhumanité, l’injustice, la barbarie. Aie humanité, wake up !

Écrire pour vivre, pour respirer, pour ventiler ce trop plein d’émotions soulevées par la folie de notre monde.

Exprimer pour ne pas réprimer, exprimer pour ne pas déprimer, mais aussi pour laisser s’imprimer en soi toutes ces réflections que nous renvoie ce monde, réel ou illusoire. Du moins, certainement un monde miroir.

Écrire juste comme ça. Et comme ceci aussi. Écrire juste comme ça. Taper quelques mots out there dans ce grand monde virtuel, rapper quelques mots qui riment et qui friment. Écrire tout seul, écrire tout bas, discrètement, écrire pour rien, écrire en vain. Et pourtant, écrire quand même.

Écrire avec tout son coeur même si nos mots ne seront effleurés que par quelques paires d’yeux, dont les vôtres. Et à ce moment, quand on sent ou pressent des yeux sur nos mots, quelque chose en nous se touche, se rejoint, se lie. Et là on sait que l’on n’écrit pas pour rien, on sait qu’on écrit pour se relier, à toi, à vous, à nous, à plus grand que soi. Et que par ces mots partagés, nos coeurs se rejoignent pour un tout petit moment d’éternité.

Et alors on sait que les Dieux et que les Déesses des mots veillent sur nous, pour nous guider vers le silence du Grand Manitou.

Aho les mots écrits tout bas !

Une réflexion au sujet de « ÉCRIRE EN DILLETANTE »

  1. Avatar de RaviRavi

    Je ne connais pas Charles Bukowski, mais je crois que je marche un peu dans ses pas, perdu dans mes sommets intérieurs. Je me donne la permission d’ouvrir face à moi-même et face à qui me lit (sans gêne?)… non, il y a encore de la gêne dans me dévoiler. Pudeur? honte? appréhension d’être jugé? C’est une rencontre de moi à moi, de moi à ce qui monte, à ce qui «pop». D’ailleurs à chaque fois que ça pop, il y a de la joie en moi, comme une rencontre avec une amoureuse qui se dessine. Je dois cueillir immédiatement ce «flash» sinon il se perd dans le grand tout… je n’y peux rien. Il m’est même arrivé d’arrêter sur le bord de la route en auto pour l’écrire tellement cela prenait de la place dans l’instant présent, comme l’ouverture d’un passage.

    C’est la vibration de ce qui monte qui m’érotise.

    merci ce matin pour ta chronique

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